Traditionnellement, le principe indemnitaire est enseigné en tant que principe essentiel en droit de la responsabilité permettant à la victime d’un dommage de solliciter et d’obtenir une indemnisation de son préjudice le replaçant dans une situation similaire à celle qui aurait été la sienne si le dommage n’avait jamais existé.

Le préjudice est donc intégralement indemnisé.

Suivant arrêt du 6 juillet 2023 (pourvoi 22-10.884), la Cour de cassation a toutefois apporté un véritable tempérament à ce principe essentiel en admettant en droit de la construction, s’agissant d’une demande indemnitaire fondée sur le coût de démolition-reconstruction d’un ouvrage, un contrôle de proportionnalité entre le coût pour le débiteur de bonne foi et l’intérêt pour le créancier au regard des conséquences dommageables de non conformités.

Déjà suivant arrêt du 14 février 2019, la Cour de cassation avait admis un tel contrôle s’agissant d’une indemnisation au titre du coût de la démolition reconstruction d’un ouvrage.

Il est à noter que cette évolution jurisprudentielle est liée à la réforme du droit des obligations et l’article 1221 du Code civil qui dispose que :

« Le créancier d’une obligation peut, après mise en demeure, en poursuivre l’exécution en nature sauf si cette exécution est impossible ou s’il existe une disproportion manifeste entre son coût pour le débiteur de bonne foi et son intérêt pour le créancier.« 

Il n’est pas inintéressant de noter que les deux espèces portaient sur une demande indemnitaire fondée sur un coût de démolition reconstruction.

S’agissant de l’arrêt de juillet 2023, la demande portait sur une hauteur sous plafond inférieure de 5cm a ce qui avait été contractualisé.

Cette évolution législative et la jurisprudence qui en découle amènent à deux commentaires contraires.

On peut se féliciter que l’on puisse avoir un rejet de demandes indemnitaires extravagantes, permettant à des maîtres d’ouvrage d’obtenir des sommes qui ne seront jamais utilisées pour des travaux de reprise.

En effet, une hauteur sous plafond de 2,48m au lieu de 2,53m n’a pas d’impact véritable sur l’habitabilité du bien immobilier et il est d’évidence que jamais le plafond existant ne sera démoli puis reconstruit.

Pour autant, cette jurisprudence et ces dispositions législatives portent aussi atteinte et une exception importante à des principes essentiels que ce soit le principe indemnitaire mais aussi à la force obligatoire du contrat.

Il est dès lors permis au juge dans ce cadre une diminution des indemnisations et donc de manière indirecte on ne sanctionne pas l’inexécution contractuelle dans sa globalité alors que la convention doit constituer la loi des parties.

Les prochains mois permettront de mieux cerner et appréhender l’application de ce nouveau contrôle.

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